Nathan Vannier, biologiste, travaille à des solutions contre la sécheresse
Nathan Vannier est un biologiste français débutant son projet de recherche au laboratoire ECOBIO, à l’Université de Rennes 1.
Bonjour Nathan, pourriez-vous nous parler de votre parcours jusqu’à aujourd’hui ?
J’ai d’abord une formation en biologie des organismes. J’ai ensuite fait un master en écologie à l’Université de Rennes 1, sur tous les types d’écologie. Cette formation se concentrait sur la compréhension du fonctionnement des écosystèmes, avec beaucoup d’approches appliquées : comment restaurer les écosystèmes ? Comment trouver de nouveaux systèmes de production agricole ? C’est là que j’ai vraiment commencé à m’intéresser à la biologie. J’ai travaillé sur les plantes clonales, comme le lierre, qui se multiplient via des stolons. Ma réflexion première est de comprendre comment elles optimisent la recherche et l’acquisition de leurs ressources.
Puis, lors de ma thèse au laboratoire ECOBIO, j’ai cherché à comprendre l’impact du microbiote sur les plantes clonales, c’est-à-dire comment les bactéries et les champignons interagissent avec les plantes et les conséquences qui y sont associées. Ce travail avait une approche centrée sur l’écologie et la microbiologie. J’ai mis en évidence que les plantes clonales sont capables de transmettre une partie de leur microbiote a leurs descendants, en particulier des champignons symbiotiques.
Vous partez après votre thèse travailler à l’Institut Max Planck pour la recherche sur la sélection végétale en Allemagne, à Cologne.
Oui, là-bas, je vais avoir une approche différente, moins centrée sur l’écosystème et beaucoup plus sur les micro-organismes. Mes recherches vont toujours porter sur le microbiote : comment font les microbes pour coloniser les racines des plantes et est-ce qu’on peut utiliser certains microbes pour proteger les plantes contre des pathogènes
? Je reste travailler trois ans à Cologne.
Qu’est-ce que le projet MICROBES ?
En quelques mots, il s’agit de trouver une solution à la sécheresse en utilisant le moins d’eau possible pour cultiver des plantes céréalières. Je vais chercher à utiliser les micro-organismes présents dans le sol pour aider la plante, avec plusieurs approches. D’un côté, je vais faire varier la composition des plantes dans le champ, ce qui va avoir un effet sur la composition des micro-organismes dans le sol que l’on va pouvoir étudier. D’un autre côté, je vais ajouter des micro-organismes directement dans le microbiote des plantes.
Ces deux approches sont très différentes, l’une plutôt centrée sur des approches d’écologie, et l’autre plutôt de la microbiologie, mais elles sont finalement le revers d’une même pièce. C’est un peu la synthèse des approches que j’ai eu jusqu’ici à ECOBIO et à l’Institut Max Planck.
Vous allez continuer à collaborer avec vos anciens collègues de l’Institut Max Planck.
Je vais en effet utiliser des souches de bactéries et de champignons isolées a Cologne et sur lesquelles j’ai travaille durant mes années à Cologne. Ces souches font partie de ce qu’on appelle une « culture collection », tenue depuis de nombreuses années par l’Institut. C’est un outil exceptionnel.
Allez-vous avoir d’autres collaborations ?
Je vais aussi travailler avec une entreprise aux Pays-Bas. J’ai rencontré son fondateur, qui est aussi chercheur, il y a quelques années. Cette entreprise s’occupe d’étudier les bénéfices des micro-organismes pour les utiliser dans la croissance de certaines plantes. Je vais y aller en tout six mois, pour pouvoir bénéficier de leurs robots et de leurs algorithmes d’analyse des génomes de bactéries. J’espère aussi bénéficier de l’approche entrepreneuriale et de leur vision centrée sur un produit applicable sur le terrain.
A ce propos, comment vos résultats pourront être utilisés ?
Cela peut mener, dans la rotation des cultures, à utiliser de nouvelles compositions de plantes cultivées dans le même champ. Il y a aussi tout un aspect de recherche fondamentale dans l’étude et l’identification des microorganismes bénéfiques lors des sécheresses. C’est un projet très ambitieux. Le plus ambitieux est peut-être d’arriver à convaincre des agriculteurs de mettre volontairement des microbes dans leurs champs pour améliorer leurs cultures, ce qui peut sembler assez contre-intuitif !
Pourquoi avez-vous choisi de revenir à ECOBIO pour mener ces recherches ?
Au-delà de raisons personnelles, j’apprécie à Rennes les interactions entre l’Université, le CNRS et l’INRAE. Ce dernier organisme a une approche assez applicative qui me plaît. Enfin, je connaissais le laboratoire ECOBIO et je savais que mon projet les intéresserait car il est assez en ligne avec la philosophie du laboratoire.
Le laboratoire travaille avec d’autres sur la Zone Atelier Armorique, une zone d’expérimentation avec des paysages très variés en Ille-et-Vilaine, et qui est une zone agricole active. Je vais y mener mes expérimentations en milieu réel, avec l’avantage d’avoir le retour d’agriculteurs en temps réel. Ils vont pouvoir me dire si mes idées sont applicables. C’est vraiment très motivant, car tout mon travail a pour but de trouver des solutions pour améliorer les systèmes agricoles.
Avez-vous une suggestion de lecture ou de visionnage pour quelqu’un qui souhaiterait en apprendre davantage ?
Oui, pour ceux qui s’intéressent au fonctionnement des écosystèmes naturels il y a un très beau film documentaire « Il était une forêt » de Luc Jacquet et Francis Hallé (cliquez ici pour voire la bande annonce). Le film montre bien comment tout l’écosystème repose sur un équilibre subtile dans lequel chaque organisme est important, des grands mammifères aux micro-organismes. Le film montre bien l’importance des microorganismes du sol qui sont a la base du recyclage de la matière organique et qui remplissent de nombreuses autres fonctions indispensables a la croissance des plantes et au bon fonctionnement de l’écosystème. On y voit aussi l’impact négatif des activités humaines sur la diversité de ces organismes.
Merci Nathan!
crédit photo: Nathan Vannier