Silke Lehmann, physiologiste moléculaire des plantes, travaille sur des extraits d’algues pour améliorer la croissance des cultures
Silke Lehmann est une physiologiste moléculaire des plantes qui travaille sur les réponses des plantes aux stress environnementaux au niveau moléculaire. Elle a commencé en octobre 2021 son projet de recherche au LBCM Vannes (Université de Bretagne Sud).
[Equipe BIENVENÜE] : Comment avez-vous commencé à vous intéresser à votre domaine de recherche actuel ?
[Silke Lehmann] : Les plantes m’ont toujours impressionné par leur capacité d’adaptation. J’aimerais comprendre comment les plantes perçoivent le monde extérieur et traitent ensuite ces informations pour faire face aux changements auxquels elles sont confrontées. Au niveau moléculaire, cela implique une jungle d’éléments biochimiques et c’est formidable de découvrir de nouveaux liens entre certains d’entre eux. En tant que physiologiste moléculaire des plantes, je m’intéresse aux réponses aux stress environnementaux tels que la sécheresse ou les agents pathogènes.
Comment le projet VASEC a-t-il vu le jour ?
Au cours d’un précédent projet en Angleterre, je travaillais avec un test biologique pour identifier les protéines fongiques sécrétées qui peuvent modifier la signalisation des plantes et, à un moment donné, j’ai pensé à employer cette technique pour rechercher des composés phytoactifs pour des solutions appliquées. Les extraits d’algues étaient une cible de choix pour moi car ils sont utilisés depuis longtemps pour améliorer les cultures – y compris en Bretagne, mais nous n’exploiterons pleinement leur potentiel que si nous comprenons leur fonctionnement. Après avoir pris contact avec Nathalie Bourgougnon, qui supervise désormais le projet à l’UBS de Vannes, elle m’a proposé de tester des enzymes issues d’organismes marins pour l’extraction des algues. C’est ainsi que nous avons combiné nos intérêts de recherche et nos expériences pour le projet VASEC.
Qu’est-ce qui vous motive dans votre travail ?
La motivation vient d’une fascination générale pour la nature. Le mois dernier, je suis allée à la plage à marée basse et j’ai réalisé comment chaque algue « choisit » son endroit préféré : courte durée d’immersion ou forts courants, plutôt que de pousser sur des rochers – et tout cela a évolué en parallèle avec des escargots, des vers et bien sûr un mélange variable de microbes également bien adaptés, c’est époustouflant. Face à la routine du laboratoire, j’aime trouver des solutions pratiques pour répondre à mes questions scientifiques. Les bonnes idées ont toujours besoin d’un regard réaliste pour être mises en œuvre – c’est pourquoi j’aime aussi développer davantage le contexte appliqué de mes recherches.
Pourquoi avez-vous choisi de venir en Bretagne ?
C’est facile : la Bretagne est une région de pointe pour les biotechnologies bleues ! Pour mon projet, j’avais besoin d’un soutien scientifique en matière d’extraction d’algues, fourni par mes collègues du LBCM, ainsi que de la proximité d’un secteur industriel qui valide les ressources marines. Peu d’endroits en Europe offrent des conditions aussi avantageuses. Il est motivant de voir comment les universitaires et les partenaires industriels travaillent ici ensemble sur des solutions appliquées.
Vous avez prévu une collaboration avec une entreprise bretonne dans le cadre de votre projet, Olmix SA.
Bien que j’aie eu l’idée d’employer le test biologique pour le développement de traitements pour les plantes, mes connaissances sur ce secteur industriel, ses processus, ses produits et ses réglementations légales sont limitées. Pour combler ce fossé entre l’idée et l’application, un partenariat consultatif avec l’industrie est essentiel. Olmix SA sont des collaborateurs idéaux pour ce projet en raison de leur expertise dans les produits à base d’algues à usage agricole et de leur localisation en Bretagne. Ces conseils professionnels permettent de détailler certaines caractéristiques requises pour les extraits d’algues et de préciser les conditions que doit remplir un essai biologique pour être intégré au développement du produit. Olmix SA a également accepté de m’accueillir pour un détachement au cours duquel nous allons tester certains extraits sur des plantes cultivées afin de valider leur potentiel en tant que traitement.
Vous aimeriez partager une ressource avec un lecteur curieux ?
Certaines personnes pensent que les plantes sont ennuyeuses car ce sont des organismes qui présentent des mouvements lents et, en tant qu’humains, nous ne sommes souvent pas capables de percevoir pleinement leurs réactions et leurs changements. Le documentaire « The Private Life of Plants » (voir la section Liens externes de l’article Wikipedia pour le regarder) de David Attenborough aide à surmonter les différentes échelles de temps sur lesquelles nous vivons et constitue un bon divertissement pour tous les âges.
Merci Silke!
Crédit photo : Silke Lehmann